Une place de marché dans une grande ville. Le bar-restaurant est fermé, bien entendu, mais il fait traiteur et des cafés. De nombreuses personnes viennent prendre un plat, surtout des habitués, d’autres juste un café et il leur est demandé de ne pas s’attrouper pour le boire. On s’éloigne et on s’adosse à des barrières métalliques qui empêchent de s’asseoir sur le banc et de se servir des jardinières des grands arbres comme tables hautes. Pourtant, on voit le long du pot, une pissaladière et un paquet avec des beignets. Pendant qu’on boit notre café, un homme d’une quarantaine d’années arrive et nous dit sur le ton de la plaisanterie : « alors, on mange mon déjeuner ? ». On comprend qu’il parle de la pissaladière et des beignets et on fait le geste de se pousser mais il nous dit de ne pas bouger qu’il repassera les prendre. Il est hélé par une jeune femme brune et va vers elle en plaisantant déjà. On le voit allant des uns aux autres, « galéjant », riant, interpellant, discutant. Il est habillé en jean, il a des « Converse » aux pieds et a un tête toute ronde surmontée de cheveux frisés gris. Il porte le masque sur le menton comme beaucoup qui boivent, fument et mangent même si lui parle seulement. Il revient et nous ré-aborde. Il voit bien que l’on remet notre masque à son approche. On pense que cela l’amuse et qu’il va nous faire « bouh » comme on fait peur à un enfant. Il nous agace mais on se dit que pour lui, ne plus pouvoir prendre un café avec ses amis, ses connaissances, au bar cela doit être terrible. C’est là qu’est son espace de vie et de ses rencontres quotidiennes et il lui est enlevé. Alors il papillonne bravement.