Sur le bord d’une route assez passante, un magasin et sa production artisanale de céramiques et de carrelages. On s’arrête et on va voir. Le magasin semble complètement vide. On croise deux clients et puis enfin, un homme d’une quarantaine d’années qui visiblement travaille-là et parle avec un client. On est seuls au centre de l’espace, au milieu de centaines de terres-cuites et carrelages de grande qualité quand un vieux monsieur s’avance vers nous. Au départ, on ne sait pas s’il travaille-là, notamment parce qu’il semble très âgé et qu’il hésite à nous aborder. Il est de taille moyenne, mince et légèrement voûté, il marche très lentement et à petits pas en traînant un peu des pieds. Il porte des chaussures ou des chaussons en tissu molletonné mais qui ont la forme d’une espadrille, puis un jean et un pull un peu large qui semble en coton, bleu clair, une veste en tissu avec un petit col qui fait penser aux vestes d’ouvrier. Il est masqué et on distingue juste ses yeux bruns et ses cheveux blancs assez longs. Il finit par nous demander ce qu’on veut et quand on lui explique nos hésitations, il tranche tout de suite et nous désigne ce qu’il faut qu’on prenne. A la manière dont il nous parle, on devine qu’il n’est pas habitué à ce rôle là, à s’occuper des clients, à les aider à choisir, à leur donner des explications, à les écouter patiemment. On le regarde s’éloigner et, à la manière dont il regarde et dont il touche les carreaux, on se dit qu’en fait ce doit être le patron historique de cette fabrique ancienne de céramiques. Peut-être, ne travaille-t-il plus vraiment mais il vient là sentir l’odeur de la terre, traîner dans les ateliers, regarder ce qui sort des fours, et même, mettre la main à la pâte. Là, tous les jours depuis toujours.