Deux frères assez jeunes tiennent deux étals côte à côte dans un grand marché, un étal de poissonnerie et un étal de coquillages et de fruits de mer. L’aîné a un visage très fin, les cheveux courts, il n’est pas grand. Au contraire, le cadet est grand, le visage large, les cheveux frisés et il joue de son côté « beau gosse ». L’aîné a un œil sur tout, il vérifie l’approvisionnement des deux étals, que tous les employés travaillent bien, que la file des poissons à nettoyer ne soit pas trop longue, il intervient quand il le faut, il tient les caisses et la carte bleu. Le cadet, même quand il y a beaucoup de clients, se tient au milieu de l’étal, parle et plaisante. L’aîné s’affaire et d’un œil acéré voit tout, et donne des ordres brefs. On regarde son visage sensible fermé et on se demande quelle blessure secrète fait que, tous les jours, vous ne le voyez sourire que de manière automatique et commerciale. Dans son duo avec son cadet, ce dernier aide à retrouver une jovialité un peu fanfaronne qui dénoue l’inquiétude viscérale qui tend ses regards et ses gestes. A un moment donné, dans une accalmie, les deux frères boivent un café. Et, un instant, la tension de l’un se relâche, les plaisanteries de l’autre cessent, et ils se ressemblent.