Un homme d’une cinquantaine d’années qui écoute un concert de musique classique. Il est habillé d’un jean, d’un tee-shirt délavé et de tongs en cuir. Il est mal rasé et décoiffé comme s’il se levait d’une sieste. Quand il est arrivé pour s’installer au premier rang, il a fait bien attention de porter avec un peu d’ostentation sa tenue négligée. L’orchestre joue et il écoute. Après le premier mouvement, l’orchestre suspend son geste pour reprendre ensuite par un mouvement plus rapide du même concerto. Pendant ce court silence, il applaudit seul. Il ne sait pas qu’il faut attendre la fin des mouvements du concerto pour ne pas gêner les musiciens. Deux ou trois personnes suivent mais lui s’arrête immédiatement. Puis il se tourne vers les gens à sa droite en souriant d’un air entendu. On ne sait pas s’il a fait cet impair exprès voulant rompre avec les codes du concert bourgeois par sa tenue et en applaudissant quand il en a envie. On se dit qu’il est venu là pour démontrer quelque chose à la petite communauté réunie pour le concert autant que pour écouter. Pourtant, ensuite, il fera toujours très attention que les applaudissements soient nourris pour applaudir à son tour. Peut-être qu’il ne savait pas et qu’il cache au mieux son malaise par une désinvolture étudiée.