un jour, une description, les recommencées

13 septembre 2020

On entend sur le marché, une voix de femme rauque et cassée qui raconte une histoire, avec des rires, qui s’arrête, quelqu’un renchérit, elle reprend. Elle travaille dans ce marché depuis tellement de temps, il lui semble qu’elle y vit autant que chez elle, près du village. Ce matin, elle s’est levée très tôt pour ramasser ses légumes et cela lui fait du bien dans sa fatigue de raconter des bêtises avec les autres. Elle aime ce rapport à la parole qui fait que, pendant un instant, ils ont le sentiment d’être ensemble et qu’il se retrouvent ainsi jour après jour. Sa forte voix cassée porte et en fait une figure de ce grand marché, elle en joue, elle harangue, elle blague, elle gronde, elle se moque. Les femmes de sa famille ont la même, un peu masculine, rocailleuse mais sans être gouailleuse avec un accent moins prononcé que ceux de la ville. Elle sait que cette voix marque son appartenance à une vallée de l’arrière pays, proche mais déjà tellement loin de la mer. Cette terre difficile qu’elle défend et qu’elle étale là avec ses légumes plus petits, venus du froid de la nuit, du soleil dur et du gris bleu des oliviers.

un jour, une description, 19 mai