Sur le grand trottoir de la promenade du bord de mer, on voit une poussette noire, seule, proche de la rambarde. On regarde donc un peu en contrebas et on voit une jeune femme assise en tailleur et un très jeune enfant, presque encore un bébé, allongé sur le dos. Il est complètement à plat, bras et jambes écartés avec un foulard rose sur le visage que l’on ne distingue donc pas. Il est posé à l’endroit de la plage où il y a des tous petits galets. A côté, la jeune femme roule une cigarette, l’allume et se penche sur son téléphone. On comprend que ce bébé s’est endormi dans sa poussette et, comme les chaises et les bancs pour s’asseoir ont été enlevés, sa mère ou sa nounou a préféré s’arrêter et lui laisser faire sa sieste. Pourtant quelque chose nous retient comme le souvenir d’une image triste. Le corps de l’enfant semble comme abandonné, presqu’échoué. On pense que c’est parce qu’il est posé là sans sa poussette, sans couverture, sans serviette, le corps directement sur les petits galets. On regarde un moment l’enfant, son doudou sur le visage, et on ne sait ce qu’on guette mais on ne s’en va qu’après l’avoir vu bouger et que sa mère ou sa nounou, le regarde, se lève, lui remette son doudou, et se réinstalle tranquillement. Comme si on attendait qu’une image de douceur vienne effacer le souvenir diffus et poignant qui nous a assailli.