un jour, une description

16 mai 2020

Un homme d’un certain âge sur un vélo qui roule lentement sur la piste cyclable d’un magnifique bord de mer. Il s’arrête et pose un pied à terre pour parler à quelqu’un qui est à pied et qu’il n’a visiblement pas vu depuis longtemps. Ils s’exclament de loin puis échangent des nouvelles sur ces dernières semaines, sur leurs familles, quelques connaissances et chaque fois que les nouvelles sont bonnes, ils disent ensemble “ah, tant mieux, tant mieux”. Ils ont l’air gênés comme s’ils n’osaient pas vraiment parler et voulaient se limiter à échanger des informations anodines. Pour eux deux, raconter la peur de tomber malade, de mourir et l’effroi de voir les gens de leur âge tomber, serait aller trop loin, une défaite même. D’un coup, pour dénouer cette tension et ces non-dits, le cycliste dit “enfin, si on est là pour en parler, c’est qu’on n’est pas morts, hein ?”. Ils sourient alors tous deux et se regardent vraiment, enfin, avec émotion. Ils laissent venir la tristesse partagée.