Deux enfants descendent un long boulevard. Ils doivent voir une dizaines d’années. C’est la fin de l’après-midi, ils sont en short, sandales et tee-shirt. L’un est brun alors que l’autre est plus clair. Ils marchent vivement, courent un peu, sautillent, se parlent, rient. Ils ont l’air de savoir parfaitement où ils sont, où ils vont et de connaître l’endroit. Un peu avant un grand carrefour, il y a un panneau de signalisation métallique assez haut. Le plus brun prend son élan, saute et touche le panneau mais sans en avoir l’air, sans que cela perturbe la marche de l’autre ou même leur conversation. Il le fait dans le flux de leurs gestes comme si c’était naturel. Quelques jours plus tard, on revoit les mêmes garçons quasiment à la même heure, au même endroit. Comme la première fois, le même garçon court, saute, touche le panneau et continue. Cette fois-ci, l’autre garçon a regardé le panneau et a juste ralenti. On se dit qu’ils passent là tous les deux très souvent, peut-être tous les jours et qu’il est établi entre eux, comme une règle tacite, que c’est le plus brun qui saute et touche le panneau. On ne sait si l’autre garçon a comme cela des droits sur d’autres gestes dans leur promenade. On en doute.